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Règlement Bruxelles II bis refonte : la circulaire de présentation est publiée

Civil - Personnes et famille/patrimoine
13/07/2023
Par une circulaire du 4 juillet 2023, le garde des Sceaux, ministre de la Justice, présente les dispositions du règlement de l’Union européenne n° 2019/1111 dit Bruxelles II bis refonte afin d’aider les couples internationaux à résoudre leurs litiges transfrontaliers en matière matrimoniale, de responsabilité parentale et d’enlèvement international d’enfants.
Champ d’application matériel. – Après avoir abrogé le règlement de la Commission européenne n°°2201/2033 plus connu sous le nom de Bruxelles II bis (Règl. CE, n° 2201/2003, 27 nov. 2003, JOUE n° L. 338/1, 23 déc. 2003), le règlement de l’Union européenne n° 2019/1111 dit Bruxelles II bis refonte (Règl. UE n° 2019/1111, 25 juin 2019, JOUE 2 juill. 2019, n° L 178), adopté le 25 juin 2019 relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale, de responsabilité parentale, ainsi que d’enlèvement international d’enfants a, en son article 1er, repris les solutions supprimées sans modifier leur champ d’application matériel.

Champ d’application temporel. – Les dispositions relatives au divorce, au retrait total ou partiel de la responsabilité parentale, etc., ont été maintenues mais le champ d’application temporel s’est vu instituer des règles spécifiques permettant l’articulation des procédures entre les deux règlements (Fiche 1). De sorte qu’en France, en vertu de l’article 100, à compter du 1er août 2022, les actions judiciaires, actes authentiques et accords enregistrés se voient appliquer le règlement Bruxelles II bis refonte. L’ancien règlement Bruxelles II bis s’applique néanmoins de manière rétroactive à toutes les décisions rendues à la suite d’actions judiciaires intentées avant cette date.

Chefs de compétences « alternatifs ». – Sur le fondement de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980, le texte européen prévoit des chefs de compétences « alternatifs » en matière de divorce, de séparation de corps et d’annulation du mariage, caractérisant de cette manière les juridictions françaises de juridiction de résidence habituelle des époux (Fiche 2). Ainsi, en matière de responsabilité parentale (art. 7, § 1) et d’enlèvement international d’enfants (art. 9), le règlement attribue compétence à cette juridiction, et ceux, même durant les trois mois qui suivent un déménagement de ce dernier (art. 8, § 1).

Règles de compétences en matière de responsabilité parentale. – Le règlement Bruxelles II bis refonte permet également aux parties d’attribuer la compétence à la juridiction d’un État membre de leur choix pour statuer sur la responsabilité parentale, à condition que l’enfant dispose d’un lien étroit avec l’État membre concerné, que les parties se soient accordées sur la compétence de la juridiction (art. 10, § 1, b), i) et qu’elles aient expressément accepté la compétence de la juridiction désignée (art. 10, § 1, b), ii). Un transfert de compétence reste néanmoins possible entre les juridictions, si l’une d’entre elles, qu’elle soit compétente ou non, s’estime mieux placée pour apprécier l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 12 et art. 13 du règlement).

Audition de l’enfant. – De plus, le règlement prévoit un renforcement du droit de l’enfant à exprimer son opinion librement par l’intermédiaire d’un représentant ou d’un organisme approprié, conformément à l’article 24 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, à l’article 12 de la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant et à l’article 388-1 du Code civil (Fiche 3). En effet, la reconnaissance d’une décision en responsabilité parentale peut être refusée ou non exécutée, si elle a été rendue sans que l’enfant n’ait pu s’exprimer (art. 21).

Enlèvement international de l’enfant. – Dans le cadre de l’enlèvement international d’enfants, le règlement est venu renforcer l’impératif de célérité visé par les articles 2 et 11 de la Convention de La Haye de 1980 (Fiche 4). Autrement dit, il a permis l’accélération de la procédure de retour en introduisant des délais stricts, afin d’assurer un retour rapide de l’enfant (art°24). À cet égard, le règlement promeut dans le cadre de ce type de procédures, le recours à la médiation et aux modes alternatifs de règlement des litiges (art. 25), la possibilité pour l’enfant et le parent délaissé d’exprimer leur opinion (art. 21, § 1), la possibilité pour la juridiction saisie d’une demande de retour d’organiser des contacts entre le parent demandeur et l’enfant (art. 27, § 2), ainsi que la mise en place de mesures provisoires ou conservatoires par la juridiction qui ordonne le retour de l’enfant (art. 15).

Pour protéger ce dernier après son retour contre un éventuel risque grave, la Circulaire du 4 juillet 2023 rappelle que le demandeur doit prouver que des dispositions adéquates ont été prises (art. 27, § 5, cons. 46). Dans le cas d’une exposition à un danger physique, psychique ou d’un placement dans une situation intolérable de l’enfant, le retour sera refusé (Conv. La Haye, 25 oct. 1980, art. 13, al. 1er, b). Par sa réforme de la procédure « passerelle » (art. 29), le règlement de 2019 permet en cas de refus, de renvoyer l’affaire devant la juridiction compétente (juridiction de l’État de résidence habituelle de l’enfant) pour statuer sur le fond du droit de garde, avant son déplacement ou son non-retour illicite.

Principe de la reconnaissance et de l’exécution directe. – Pour réduire la durée et le coût des litiges transfrontaliers, le règlement Bruxelles II bis refonte consacre, sur le fondement de la confiance réciproque dans l’administration de la Justice au sein de l’Union, le principe de la reconnaissance et de l’exécution directe (Fiche 5). Contrairement au règlement Bruxelles II bis, ce dernier supprime la procédure de déclaration de force exécutoire concernant les décisions en matière d’autorité parentale, et introduit la possibilité de contester et de solliciter le refus de l’exécution de ces décisions et de celles rendues en matière matrimoniale (art. 30 et art. 40).

Rôle des autorités centrales en matière de coopération. – Le règlement Bruxelles II bis refonte renforce également le rôle des autorités centrales en matière de coopération (Fiche 6), en précisant leurs attributions et les tâches qui leur sont confiées (art. 76 et s.). Elles peuvent être sollicitées par d’autres autorités centrales ou par l’un des titulaires de la responsabilité parentale, afin d’aider à la mise en œuvre de décisions en matière de responsabilité parentale ; droit de visite notamment (art. 81, § 1), mais aussi pour recueillir, coopérer et échanger des informations pertinentes tout en respectant les droits procéduraux et le principe de confidentialité des informations (art. 78, art. 79, b et art. 86, § 1). Alors que l’approbation de l’autorité centrale n’est pas requise dans les cas de placement de l’enfant auprès d’un parent (art. 82, § 2), le règlement Bruxelles II bis refonte introduit des modifications par rapport à l’article 56 du règlement Bruxelles II bis (Fiche 7). Il exige l’approbation de l’autorité centrale de l’État membre requis pour placer l’enfant dans ce dernier (art. 82, § 1).

Délivrance de certificats. – Ainsi, par la désignation des autorités compétentes dans la délivrance de certificats, certaines dispositions du Code de procédure civile ont été adaptées (Fiche 8). En effet, les certificats accompagnant les décisions judiciaires intentées avant le 1er août 2022 se voient appliquer le règlement Bruxelles II bis, et sont délivrés par l’autorité compétente de l’État membre (art. 39) et par le juge d’origine (art. 42). En vertu de l’article 36 du règlement Bruxelles II bis refonte, la partie qui souhaite faire reconnaitre une décision rendue par un État membre doit établir une copie de la décision pour les décisions en matière matrimoniale, en matière de responsabilité ·parentale ou ordonnant le retour d'un enfant. Toutefois, conformément à l’article 66 du règlement Bruxelles II bis refonte, un certificat approprié est nécessaire pour les actes authentiques et les accords relatif à la responsabilité parentale exécutoires de plein droit dans les États membres autre que celui d’origine.

Enfin, le règlement clarifie son articulation avec la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 (Fiche 9) dans le cas où un enfant a été déplacé ou retenu illicitement dans un État membre autre que l’État membre dans lequel il avait sa résidence habituelle (art. 96). L’article 97 prévoit quant à lui que les dispositions du règlement en matière de compétence, de reconnaissance, d’exécution et de coopération prévalent sur celles de la Convention de La Haye du 19 octobre 1996.
 
Par Johanna Barge
Source : Actualités du droit